La coopérative : antidote au chacun pour soi français ? Un entretien avec Raymond Lévy

Grand spécialiste de l’économie sociale, Raymond Lévy est un de ses agents du changement. Sa carrière s’est passée à la tête d’associations et de mutuelles. Par ailleurs, il est formateur à la pointe de toutes les questions qui la concernent. 

De l’avis général, le mal du dirigeant français est le chacun pour soi. Ses concurrents étrangers « chassent en meute ». La coopérative, qui semble avoir fait des miracles pour le paysan, lui aussi extraordinairement individualiste, pourrait-elle être une solution à notre mal national ? Voilà la question qui lui a été posée.

Quelle est l’histoire de la coopérative dans le monde agricole ? 

C’est une histoire en plusieurs volets. 

La coopérative agricole s’est développée à la fin du 19ème siècle. Cela résulte d’une nième crise agricole. Elle avait pour ambition de partager des outils de production, des investissements lourds. C’était l’époque de la révolution industrielle. 

Après le partage industriel, est arrivée la coopérative de partage du support commercial. Par exemple, les coopératives vinicoles ont centralisé la production, y compris en mélangeant les vins, et organisé une vente commune. 

Aujourd’hui, les coopératives sont des outils hyperpointus. Une coopérative comme InVivo est un monstre. Elles sont à la main des financiers. Elles ont échappé aux coopérants. Cela correspond, encore une fois, à l’évolution du monde. L’agriculture change, s’industrialise, s’internationalise.  

Il demeure de petites coopératives historiques, des pièces de musée, qui vivotent.

Et dans le monde de l’entreprise ?

Contrairement à ce qui se passe en Allemagne, les coopératives en France ne se développent pas en nombre. On crée des coopératives industrielles quand les choses ne vont pas. Au bord du dépôt de bilan, un sous-traitant de l’automobile ou encore les thés 1336, créé par les salariés de Fralib (Unilever), se constitue en SCOP,  par exemple. Cela correspond à une problématique sociale. La coopérative devient alors un simple habillage politico-juridique qui s’impose, face au « lâchage » de l’économie de marché traditionnelle. 

Quel est le bon usage de la coopérative, pour l’entreprise ? 

L’ancienne CAMIF était l’invention d’une communauté d’instituteurs, de personnes qui avaient une même culture. Ce n’était pas une coopérative au sens propre du terme. 

La coopérative est un outil mis en commun par toutes les entités qui en auraient besoin. Un outil coopératif permet à tous ses membres d’atteindre individuellement leur objectif, par exemple l’exportation. Cela permet, dans ce cas, de ne pas aller seul à l’international. 

Mais cet outil existe, c’est la Chambre de commerce. 

Pourquoi les Chambres de commerce n’assument-elles plus ce rôle ? 

D’une part, elles se sont égarées dans la diversification de leurs activités originelles. Elles ont créé, par exemple, des executive MBA, des danseuses sans rapport avec leur mission. D’autre part, les gouvernements qui se sont succédé n’ont pas reconnu les corps intermédiaires comme tels, c’est-à-dire comme moyens de transmission de la pensée du président. Vous ne représentez personne leur ont-ils dit. 

C’est vrai, en particulier, des syndicats. Les syndicats professionnels sont devenus des assemblées de notables. Ils n’ont plus aucune action pratique. L’épidémie de coronavirus les ramène à leur raison d’être : un syndicat est là pour venir en aide à ses mandants. Le syndicat doit m’aider au quotidien, dans mon business. 

L’outil existe, faut-il le réorienter, ou le faire couler au profit de nouveaux instruments coopératifs ? 

Publié par Christophe Faurie

Président association des INTERPRENEURS. Nos entreprises ont une créativité hors du commun : c'est la solution aux problèmes du pays.

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