La vie de start up industrielle. Suite de notre enquête en partenariat avec le Collectif Startups Industrielles France.
Aujourd’hui, une rareté parmi les start-up industrielles : une entreprise qui en est à sa seconde usine. Et une ambition hors du commun : éliminer la machine à laver. Un entretien avec Alphadio Olory-Togbe, fondateur du Lavoir Moderne. (https://www.lavoirmoderne.com/)
Quelle est l’histoire de votre entreprise ?
J’ai fait des études de génie mécanique. Au lieu de devenir ingénieur, j’ai poursuivi par une école de commerce. J’ai été durant un an ingénieur d’affaires dans l’industrie. Le hasard a fait que j’ai pu reprendre une entreprise de leasing de matériel informatique. C’est Industry Capital, son métier est maintenant le leasing de matériel industriel.
A un moment de ma vie de dirigeant, j’ai constaté que je ne parvenais pas à “passer à l’étape supérieure”. J’ai décidé de faire un executive MBA à HEC. Là, je me suis trouvé avec 200 élèves, qui avaient le même problème que moi. Le dirigeant doit se former. Cela permet d’acquérir des réflexes que l’on n’avait pas. Par exemple la résolution de problèmes en groupe, en “transversal”. C’est totalement différent du mode de direction “vertical” de l’entreprise traditionnelle. J’ai appris plein de choses, mais cela a surtout changé ma vision de l’entreprise. Il fallait être beaucoup plus ambitieux et partir d’une feuille blanche !
Il se trouve que je déteste m’occuper du linge. Je confiais mon linge à l’extérieur. Ce qui me coûtait une fortune ! Je me suis demandé pourquoi le lavage coûtait tant au particulier et si peu à l’entreprise, notamment aux restaurants et aux hôtels.
Pourquoi ne pas se substituer à la machine à laver ? La machine à laver est une hérésie. Elle est très peu utilisée, au mieux une fois par jour. C’est le deuxième poste de consommation d’énergie de la maison. Elle est nuisible pour l’environnement. Outre les lessives, les vêtements synthétiques produisent des particules de microplastique, de quoi polluer, chaque année et pour une famille, un étang de 2 hectares. Ces particules de microplastique partent dans la mer, où elles représentent un tiers de la pollution par le plastique. Elles sont consommées par les poissons, et nous reviennent dans notre alimentation. Car on ne sait pas les filtrer.
Quelles ont été les étapes du projet ?
On a démarré il y a 8 ans. Il a fallu 7 ans pour mettre au point le processus industriel. Le Covid ne nous a pas aidés !
Les processus industriels n’étaient pas adaptés pour le linge délicat du particulier. Le linge professionnel, les vêtements, les draps, etc. sont majoritairement en coton, qui se dégrade naturellement, et sont conçus pour un lavage intensif. Le linge délicat des particuliers ne supporterait pas de tels traitements. Nous avons dû inventer des processus pour linges délicats : des processus de tri, de traçabilité, de séchage, de pliage, etc.
Cela nous a conduits à nouer des partenariats. Par exemple avec le CEA, pour la conception d’un robot de tri. Il va multiplier par 10 la performance du processus, avec réduction corrélative de son coût.
Entre janvier et décembre 2022, notre volume de production a été décuplé. Nous traitons 3 tonnes par jour. En 2023, il va être à nouveau triplé ou quadruplé, ainsi que le chiffre d’affaires. Nous travaillons en 2X8. Mais nous avons pour vocation 22h/jour, quasiment 365 jours par an.
Nous parvenons déjà à recycler 40% des eaux de process. Avec l’Institut Français du Pétrole, nous menons un projet de filtration des microplastiques qui nous permettra à terme de recycler 100% de l’eau que nous utilisons, mettant ainsi un terme à la pollution de l’environnement liée à l’entretien des vêtements.

Une première usine nous a permis de mettre au point notre RetD, et de tester la sensibilité au prix du marché. Nous en ouvrons une seconde, de 3500m2. Toujours à Pontoise.
L’étape suivante, l’année dernière, a été commerciale. Nous voulons travailler à grande échelle. Nous avons signé des accords avec des distributeurs tels que Auchan, Leclerc, Intermarché ou Cora. Ils font connaître nos services, ils collectent le linge, puis le ramènent. Nous nous inscrivons dans des circuits de courses existants. C’est du “one stop shop” : on ne crée pas de nouvelles routes que devrait emprunter le consommateur pour accéder à nos services, il y accède naturellement dans ses déplacements du quotidien.
Nous arrivons au bon moment : toute la grande distribution recherche des services nouveaux à proposer à ses clients.
Comment voyez-vous l’avenir ?
Notre solution est mature, déployable immédiatement et avec des bénéfices concrets et chiffrables pour l’environnement et les consommateurs. Le marché est considérable. Il est mondial.
Laverie et pressing n’en représentent que 3%. Nous visons le reste. Les USA et la Chine sont en avance dans le traitement externalisé du linge. Les USA, parce que le client est prêt à payer cher, la Chine, parce que la main d’œuvre coûte peu. Dans les deux cas, c’est du semi industriel. En Europe, il n’y a rien, aucun de ces deux modèles ne marche.
Notre modèle, industriel, nous permettra d’être moins cher que les Chinois.
La Chine, d’ailleurs, devrait être particulièrement intéressée par nos techniques : les particules microplastiques y sont considérées comme un fléau. C’est là que leur étude est le plus poussée.
Nous aurons des concurrents. Cependant, nous avons de l’avance, et nous sommes confiants quant à notre capacité à construire des barrières technologiques à l’entrée, et à faire la course en tête.
Quels sont les problèmes auxquels vous êtes confronté ?
Il y a la question industrielle d’abord. C’est le quotidien de l’entrepreneur. Pour certains métiers (par exemple la traçabilité) nous avons cherché des conseillers. Et, en plus, ils sont devenus investisseurs !
Nous avons aussi noué des alliances, pour la mise au point d’outils industriels, par exemple pour le lavage et le repassage. Dans ces cas, nos partenaires font profiter leurs clients de nos apports.
Dans d’autres, notre avantage concurrentiel, par exemple le séchage, le tri automatique, l’économie d’énergie, nous travaillons avec des partenaires scientifiques, et conservons l’exclusivité du savoir-faire.
Mais le chemin de croix, ça a été le financement.
Avec un associé nous avons chacun apporté un million d’euros pour lancer l’idée.
L’écosystème financier ne voit que par les start-up du digital, les start-ups industrielles sont ignorées alors qu’elles sont une source d’innovation de rupture. Ce sont les innovations de rupture qui nous amèneront vers les objectifs de décarbonation et de baisse de la pression environnementale que le monde recherche désormais !
On s’est donc tournés vers les investisseurs privés, et on a utilisé notre réseau. On est parvenu à trouver une centaine d’investisseurs et à lever 10 millions d’euros, plus 2m€ en prêts de la BPI. Pendant longtemps, mon meilleur argument, pour convaincre un investisseur a été une visite de l’usine.
La prochaine étape est de faire entrer un fonds d’investissement. Il faut à la fois qu’il ait des ambitions compatibles avec les nôtres, et assez de ressources pour nous accompagner.
Entre temps, je cherche un “bridge” de 2m€. Mes investisseurs vont apporter 1m€, il faut que je trouve le million supplémentaire.

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Bravo et bonne continuation
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